François et Anne sont sur le point de vendre leur propriété. Ils mentionnent à leur notaire qu’ils n’ont pas d’hypothèque à rembourser. Toutefois, après l’examen des titres, ce dernier les avise qu’ils auront quand même des frais à payer pour la radiation de l’hypothèque qu’il a relevée au Registre foncier. Incrédule, le couple se demande pourquoi, puisqu’ils n’ont qu’une marge de crédit hypothécaire. Ont-ils tort ou raison ?
Avant l’entrée en vigueur du nouveau Code civil du Québec en 1994, la majorité des actes d’hypothèque signés étaient des prêts hypothécaires. Comme son nom l’indique, le prêt et l’hypothèque sont reliés et se trouvent dans le même document. En vertu de celui-ci, le créancier consent un prêt en argent que l’emprunteur s’engage à rembourser par versements mensuels. À titre de garantie du remboursement, ce dernier hypothèque sa propriété pour le montant du prêt. Le prêt était donc relié à son hypothèque. En remboursant le prêt intégralement, on obtenait aussi la quittance de l’hypothèque. Par conséquent, même si légalement le prêt et l’hypothèque étaient et sont encore deux actes juridiques distincts, dans l’esprit populaire, l’hypothèque désignait tant le prêt que la garantie.
Mais en 1994, le droit des hypothèques a changé. Aujourd’hui, il est possible de garantir sous la même hypothèque le remboursement de plusieurs types de crédit accordés en même temps, ou à des moments différents. Dans le cas de François et Anne, le conseiller de leur institution financière leur avait proposé de modifier leur prêt hypothécaire en garantie hypothécaire afin de pouvoir bénéficier des avantages introduits par les nouvelles règles. Puisque la banque offrait de payer les frais de notaire, le couple a accepté de convertir son prêt hypothécaire en garantie hypothécaire pour une marge de crédit. Voilà donc la source de la confusion!
L’ABC de l’hypothèque
Prêt, marge de crédit, carte de crédit, prêt auto, etc. sont autant de façons d’obtenir du financement. L’entente négociée avec le prêteur comprendra un seul type de financement ou plusieurs, selon le cas. Par exemple, pour François et Anne il n’y avait pas de prêt, seulement une marge de crédit alors que d’autres préféreront négocier un prêt et une carte de crédit, mais pas de marge de crédit. Mais dans les deux cas, sans garantie, jamais le prêteur n’accepterait d’avancer de tels montants d’argent. En consentant à donner sa propriété en garantie, on peut donc bénéficier d’un prêt plus élevé, d’un meilleur taux d’intérêt et d’une période de remboursement plus longue (l’amortissement).
C’est ici qu’entre en ligne de compte l’hypothèque. De quoi s’agit-il précisément? C’est le droit que l’on consent à son créancier de prendre sa propriété en paiement si l’on ne respecte pas son engagement de rembourser. En d’autres termes, l’hypothèque donne l’assurance au créancier qu’il sera payé.
Pour un particulier, sur sa résidence, l’hypothèque accorde deux recours au créancier : la prise en paiement et la vente sous contrôle de justice. Avec la première, le créancier devient propriétaire du bien hypothéqué qu’il pourra vendre par la suite pour se rembourser. Avec la vente sous contrôle de justice, la propriété hypothéquée est vendue par une personne nommée par le tribunal, souvent un huissier de justice, qui remboursera le créancier à même le produit de la vente.
L’hypothèque parapluie
Bien que le prêt hypothécaire traditionnel soit encore utilisé par certaines banques, la plupart du temps, l’acte que vous signez chez le notaire est un acte de garantie hypothécaire. À la différence du prêt hypothécaire, la dette n’est pas créée dans l’acte notarié de garantie hypothécaire, mais dans un document distinct.
Chez certains prêteurs, le contrat constatant l’endettement sera annexé à l’acte d’hypothèque, alors que chez d’autres, seul le montant de la garantie hypothécaire sera mentionné dans l’acte. Vous serez alors appelé à garantir par votre propriété le remboursement de toutes les sommes actuelles ou futures que vous pourriez devoir à ce créancier. L’hypothèque n’est donc plus reliée à un seul prêt, comme c’était le cas avant 1994, mais à tous les financements présents et futurs.
Il faut savoir que puisque le montant de la dette totale, incluant le montant que vous emprunterez peut-être dans le futur, est encore inconnu lors de la signature de l’hypothèque, bien souvent le créancier prendra une garantie égale ou supérieure à la valeur de votre propriété, même s’il ne peut vous prêter ce montant.
En misant sur la valeur que prendra votre propriété, le prêteur vous donne ainsi accès à du financement futur, et ce, sans que vous ayez à repasser devant le notaire. C’est ce que l’on appelle une hypothèque parapluie. Mais attention, il n’y a pas que de bons côtés! Pour François et Anne par exemple, la banque leur a réclamé le remboursement de leur prêt auto et de leur marge de crédit avant d’accepter de signer la quittance (mainlevée). En effet, lorsqu’ils ont emprunté pour acheter leur véhicule, leur conseiller leur a proposé un meilleur taux en rattachant le prêt auto à l’hypothèque. Ils avaient oublié ce détail qui est lourd de conséquences…
S’informer avant
Bien souvent, c’est le notaire au moment de la signature de l’hypothèque qui informe le consommateur sur les détails du produit de financement qu’il a contracté. Par exemple, il explique au client pourquoi le montant de l’hypothèque est supérieur à celui de l’emprunt et ses conséquences. Mais rassurez-vous, car le créancier ne peut exiger un montant supérieur à ce qu’il vous a réellement prêté ! En revanche, une fois devant le notaire, il sera souvent trop tard pour renégocier l’entente avec votre institution financière si vous réalisez que cela ne vous convient pas.
Alors, qu’en est-il des frais demandés à François et Anne par leur notaire ? Il faut savoir que même si l’on a remboursé ses emprunts en totalité, que la marge de crédit est à zéro et que la banque nous a remis une lettre confirmant le tout, cela ne suffit pas pour retirer l’hypothèque affectant une propriété. La signature et la publication au Registre foncier du Québec de l’acte de renonciation à ses droits hypothécaires par le créancier, qu’il s’agisse d’une quittance ou d’une mainlevée, sont des formalités incontournables. Alors, faites vos vérifications pour éviter les imprévus au moment de la vente de votre propriété!
Vous avez des questions au sujet de l’hypothèque ? Un bon conseil : allez voir un notaire.